Miettes électorales : les castors se mobilisent et autres billevesées...
Cette campagne fertile en surprises se termine sur une dernière surprise : ce qui était prévu de longue date est advenu, Marine Le Pen et Macron sont vainqueurs. Comme il fallait s'y attendre la belliqueuse troupe des castors s'est rassemblée pour "faire barrage à", mais avec d'étranges défections et des ralliements plus étranges encore. La Droite quasi unanime l'a fait, et en particulier Fillon qui trahissait ainsi son discours sur notre identité et notre culture au Puy-en-Velay. Soutenir celui qui a déclaré qu'il n'y avait pas de culture française, qui refuse de défendre notre langue, c'est-à-dire notre identité même, c'est quand-même un peu fort de café. A l'inverse Mélenchon a refusé de donner des consignes de vote à ses électeurs et beaucoup lui sont tombés dessus à bras raccourcis dénonçant son amertume et sa noire complicité objective avec les forces du Mal. Or, on peut comprendre que ce candidat qui s'y voyait déjà après sa remontée spectaculaire ait été déçu et un peu triste, mais il y a autre chose. D'abord par respect de la démocratie et de la liberté de pensée de ses électeurs (il n'est peut-être pas le caudillo qu'on a dit parfois), ensuite pour des raisons politiques. Comment pourrait-il accepter de cautionner l'homme de la dérégulation, de la libre circulation des marchandises, des capitaux et des hommes, du libéralisme sans frein ? Tout son passé politique le lui interdit. Mais Marine Le Pen, direz-vous ? Je me demande - révérence gardée - s'il n'a pas plus de sympathie pour une femme qui fait un discours de remerciement politique, où ses idées - toutes mauvaises qu'elles puissent être - sont clairement exposées, notamment la grande question qui devrait être au centre du débat avec son adversaire, celle de l'Europe. Quel contraste avec le discours de Macron, un gloubi-glouba tout juste bon à nourrir des bobos ignorants de l'histoire, des djeunes, élèves d'écoles de commerce, et des rombières sur le retour. Il a même, ce traître, osé employer plusieurs fois le mot "patriote" sans vergogne aucune. Un projet ? Il en a un : faire tourner la machine à ramasser des profits; le reste, il s'en fout.
Le pauvre Fillon, dès qu'ils le surent battu, ses "amis" lui tombèrent sur le poil et lui taillèrent un costume (facile...). Lui-même eut (enfin!) l'élégance de reconnaître sa responsabilité, mais il était bien temps ! Arriver à faire perdre la Droite dans un pays où elle est sociologiquement majoritaire et après un quinquennat de gauche calamiteux, il fallait le faire ! Espérons que cela mettra un terme à une carrière déjà bien remplie et que cela lui aura évité d'atteindre son point d'incompétence. Rappelons tout de même qu'il a été victime, quoi qu'on en dise, d'une campagne de presse orchestrée qui a pu faire la différence. En tout cas les rats ont vite quitté son navire, notamment son premier ministre annoncé, François Baroin qui s'est révélé un petit arriviste de la plus belle eau. Pas de maroquin, en tout cas, pour ces bonnes gens, à moins qu'ils ne se rallient à Macron, mais je crois plutôt qu'ils vont attendre le troisième round qu'ils peuvent gagner.
Je suis passé hier soir peu après huit heures devant la Mutu où s'étaient réunis les partisans de Hamon. Sombre soirée. Les derniers, des jeunes avec drapeaux européens ou français, quittaient les lieux, l'air sinistre. Oserai-je dire que je me réjouis de cette défaite qui me fait croire en la Justice immanente. Ce médiocre ambitieux (mais peut-être manipulé par l'ogresse de Lille bouffie de ressentiment) qui a pendant des années mis des bâtons dans les roues de son gouvernement et de son parti a trouvé là son châtiment. S'il a fait un petit peu mieux que Deferre en 1969, le PS est laminé et mettra du temps à se reconstituer en l'absence de tous ceux qu'a siphonnés Macron. Je le vois mal s'en sortir aux législatives. Peut-être survivra-t-il comme un parti social-démocrate classique si les frondeurs passent sous les fourches caudines de Mélenchon.
Dupont-Aignan ne sera pas remboursé de ses frais de campagne. Bien fait ! Cela servira de leçon à tous les députés de base qui se croient une mission et ne représentent qu'eux-mêmes et des courants qui sont à peine des ruisselets.
Nous ne sommes pas prêts, en revanche, d'être débarrassés des candidats folkloriques. Ô, mânes de Barbu (cf message précédent), réjouissez-vous ! Les trotskistes font, comme d'habitude, un score minuscule (je ne compte pas Mélenchon), mais Asselineau, qui avait quand-même un programme clair et pensé même si on n'est pas d'accord, est battu par Lassalle dont la trogne, l'accent rocailleux et la légende faisaient rire, plus même que son programme : un vote en forme de pied-de-nez. M'est avis qu'il va y en avoir beaucoup de pieds-de-nez, sous une forme ou une autre, dimanche prochain.