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Causons derechef
23 mars 2024

Au bon temps de Pompidou

Le "Figaro magazine" de cette semaine consacre son grand article aux "Années Pompidou" et ajoute malencontreusement ce sous-titre :" un modèle pour aujourd'hui". Non, Pompidou était de son époque et aurait probablement détesté la nôtre en homme jouisseur (ah, la cigarette) et cultivé qu'il était. Passons donc sur l'analyse politique à laquelle se sont livrés 2 compères, un inspecteur des finances et un politicard et revenons à la cigarette. Elle figure sur la couverture du magazine : on voit le président de profil à côté d'un hublot (merveilleuse époque où on pouvait encore fumer en avion...) avec son nez busqué, ses sourcils broussailleux, ses fines mains de clerc. Il tire avec conviction sur sa winston et contemple le ciel d'un air rêveur, tout à son plaisir de fumer. Cette photo m'a fait irrésistiblement penser au vers de Mallarmé :

"Je fume au nez des dieux de fines cigarettes"

(je peux bien citer Mallarmé, lui osait citer Eluard à des journalistes qui en eurent le sifflet coupé). On la retrouve cette cigarette sur d'autres photos dont une où un père, inconscient des dangers du tabac, lui colle sa petite fille sous le nez. Je n'ai pas, hélas, retrouvé celle de la 4L de Cajarc, voiture mythique des années 70. Ces années (et la fin des années 60) Eric Neuhoff les évoque avec talent. On y retrouve le fêtard qui dut se restreindre sous la pression du Général, l'amateur d'art moderne, goût qu'il partageait avec sa femme, celui qui déclarait "Les Français aiment la bagnole" (avec un "b"accentué) et qui aménagea routes et autoroutes. Le mouvement étudiant n'en finissait pas de mourir, on assista à la création de "Libé" et le Pc faisit encore de scores suffisants pour effrayer le bourgeois. Neuhoff évoque aussi abondamment le cinéma, le théâtre et la littérature d'époque : nous n'avons pas à en rougir.

Et moi, et moi et moi...j'ai atteint ma majorité civique en entrant dans les années Pompidou. Du reste j'ai voté Poher qui à mes yeux avait les plus grosses fesses (les amateurs de Reiser me comprendront) par antigaullisme (on en avait pris pour 11 ans). J'ai été ému par le poème d'Eluard en hommage à Gabrielle Russier (qu'est-ce qu'elle ne prendrait pas, la pauvre, aujourd'hui!). Pour le reste j'ai vécu pas malheureux dans un pays qui s'enrichissait (mais je ne m'en apercevais pas). Je me rappelle aussi l'aggravation de sa maladie et ses proches et les journalistes qui en quêtaient les signes. J'ai appris sa mort au Vietnam où j'étais lecteur dans une fac. Je crois que mon oraison funèbre a été un peu sèche, ce qui a choqué mes étudiants assez sentimentaux. Et puis les années ont passé et Pompidou a vieilli comme du bon vin. Est-ce lui ou ma jeunesse que je regrette? Qu'importe, et tiens, je vais allumer une cigarette en son honneur.

 

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