L'archange et le démon
Je tiens avant tout à placer notre nouveau premier ministre sous la protection de Sandrine Rousseau qui, dans un des tweets dont elle a le secret, s'est montrée catégorique :" Gabriel Attal est juif et gay Très bien. Aucune attaque, de près ou de loin, de manière directe ou indirecte, là-dessus. Jamais.". Son maniement des figures de style, ici la prétérition, ne manquera jamais de nous étonner... Accessoirement je le mettrai sous la garde du saint archange dont il porte le nom, Gabriel, c'est-à-dire "Dieu est mon héros". Faut-il vous en dire plus quand on sait que depuis Mitterrand tous les présidents français ont droit au titre de "Dieu"? Or, justement, la première réaction des journalistes a été de l'opposer à son double démoniaque Jordan Bardella qu'il devra combattre et vaincre aux Européennes. Nous avons face à nous deux beaux bruns qui vont s'affronter dans un duel à mort : à ma droite un provincial et fils du peuple qui n'a même pas fini ses études, à ma gauche un parisien né avec une cuillère d'argent dans la bouche qui a fait sciences po. Gaby (il me permet de l'appeler ainsi) a intérêt à l'emporter : il a été mis là pour ça essentiellement. Macron n'attend plus de son quinquennat raté que quelques consolations marginales comme une victoire aux Européennes. Sera-t-il, de surcroît, un bon premier ministre, on peut en douter : la tâche semble trop lourde pour ses frêles épaules. Dommage, on peut rêver : et s'il était resté à l'Education nationale? Mais les vieux crocodiles dans le marigot feront le travail en poussant sur le côté ce jeunot que leur a imposé le caprice du Prince. Celui-ci, ulcéré par ses échecs, voudrait s'offrir une autre victoire symbolique : la conquête de Paris par sa majorité avec l'aide de Rachida-les-dents longues qu'il a nommée à la Culture. Passons sur les viles accusations de corruption que des jaloux (ou jalouses) ont portées contre elle et saluons la discrétion de la Dame qui n'a jamais cité un auteur, qu'on n'a jamais vu au théâtre ou à l'Opéra, même pour les soirées de gala, que je n'ai jamais croisée à la Cinémathèque. Reconnaissons qu'elle allait parfois dans les musées quand un couturier y présentait sa collection (oui, ça sert à ça aussi un musée, il faut bien vivre).Elle y paraissait toute de noir vêtue et en talons aiguille à faire rêver un fétichiste. La réaction assez vive (pour dire le moins) à sa nomination est-elle une manifestation de mépris de classe? Peut-être. Chose amusante, elle est tellement haïe que ses ennemis ont même fait l'éloge de celle qui l'a précédée et qui était pourtant d'une grande médiocrité. Finissons par celle qui a réussi le plus beau coup : braquer d'un seul coup, d'un seul, la masse de gens dont elle a la responsabilité. Vous aurez reconnu la championne de tennis et maintenant de la gaffe,Amélie Oudéa-Castéra dont l'éloge de l'enseignement privé est fort mal passé, surtout s'agissant de Stanislas présenté par la presse progressiste (je ne lis qu'elle) comme un bastion de la réaction et l'antre du Vice. Elle a eu l'audace de prétendre que non seulement sa progéniture bénéficiait du nombre d'heures de cours prévu,(ceux qui disent "c'est bien le moins" n'y connaissent rien) mais qu'en plus ils y étaient heureux. Elle a ainsi déclenché une tempête dans le Landerneau qu'on lui avait attribué. Il faut admettre que les profs de l'enseignement public ont quelque raison d'avoir l'épiderme sensible quand on voit ce qu'ils subissent: élèves violents, parents agressifs, hiérarchie caponne, heures non remplacées parce qu'il n'y a pas assez de remplaçants (l'enseignement privé se débrouille mieux dans ce domaine, il faut l'admettre, parce que la pression sur les profs est plus forte). Difficile de lui prédire un long avenir à la tête de ce ministère, visiblement elle a atteint son point d'incompétence, mais qui voudra la patate chaude? (si on y remettait Bayrou, ce serait rigolo et personne n'a mieux que lui caressé les chers professeurs dans le sens du poil...). M'est avis que les mois qui viennent vont être lunaires, pour reprendre l'épithète à la mode, qu'avec tant de prétentions et si peu de talents le décennat de Macron va mal finir mais on va bien rigoler.