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Causons derechef
8 mars 2021

Mes papes

Tout catholique zombie que je sois, je ne pense pas au pape tous les jours, mais la photo récente où on le voit avec l'ayatollah Sistani, blanc corbeau et corbeau noir, m'a rappelé tous ceux que j'ai vu défiler dans ma vie, presque autant que de présidents de la république.

Le premier fut Pie XII qui arborait un air sévère et avait la réputation de l'être sur les moeurs et la doctrine. Un jeudi matin de l'automne 1958 nous jouions avec mes camarades sur la place du village en attendant le catéchisme quand le curé sortit de l'église et nous apprit sa mort. Je suppose qu'il nous fit prier ensuite pour son âme noire. Son âme noire? Oui, car le scandale éclata quelques années après avec la pièce d'un dramaturge allemand : Le vicaire. L'auteur accusait "monsieur-tout-blanc" de sympathie pour le nazisme et d'indifférence au sort des Juifs. Vrai?faux? Dieu seul le sait. En tout cas catholiques traditionalistes et progressistes s'empaillèrent des années sur son cas.

Lui succéda Jean XXIII qui formait un parfait contraste car il était plutôt rondouillard et souriant. Il avait été nonce en France et portait le titre fascinant de patriarche de Venise. Il était aussi franchement moderniste, comme on dit dans l'Eglise, et mit les bouchées doubles pour réformer l'institution en convoquant un concile dont il ne vit pas la fin car son pontificat fut bref. Je fréquentais encore les églises à l'époque et lui en voulus terriblement d'avoir remplacé le latin par les langues vernaculaires,(Comme dit le poète:" Sans le latin, sans le latin, la messe nous emmerde"), banni le grégorien et remplacé les autels par des cubes de béton. Son aggiornamento brutal fut à l'origine d'un courant traditionaliste qui frôla le schisme.

Ensuite vint Paul VI qui connut un long pontificat. Alors que ses prédécesseurs ne quittaient Rome que pour Castel Gandolfo il inaugura l'ère des "flying popes".Il visita tous les continents, particulièrement les pays catholiques des Tropiques, prit des bains de foule jusqu'à ce qu'il se protège dans l'habitacle de sa "papamobile" après une tentative d'assassinat aux Philippines. Il marcha aussi cahin-caha sur les traces de son prédécesseurs, avec - semble-t-il - plus de mesure, mais je ne saurais l'assurer : j'étais alors fort éloigné de l'Eglise.

1978, l'année où mourut Paul VI est connue comme "l'année des 3 papes" puisque lui succéda Jean-Paul 1er qui s'effaça au bout de quelques mois. A moins qu'on ne l'ait effacé, il s'en passe peut-être de drôles dans les caves du Vatican. Le fait est que ce pape éphémère, dont le profil rappelle celui de ces religieux que les cardinaux allaient parfois dénicher au fond d'un monastère, sûrs qu'ils n'exerceraient aucun pouvoir, ne semblait pas à la hauteur de sa tâche. Dieu, après tout, l'a peut-être rappelé à lui pour la grandeur et la gloire de son Eglise...

Apres ce court intermède, apparut une forte personnalité, c'est le moins qu'on puisse dire. L'élection de Jean-Paul II mit d'abord fin à une longue tradition qui voulait qu'on élût que des cardinaux italiens. Lui succédèrent d'ailleurs un Autrichien et un Argentin. Sa force physique, même après qu'il eut été sérieusement blessé dans un attentat, lui donnait une sorte d'aura. En bon catholique polonais, il était assez conservateur, ce qui lui permit de remettre un peu d'ordre dans une église où on tirait à hue et à dia. Mais avant tout il faut lui savoir gré de son rôle politique, il a indéniablement accéléré la libération des pays de l'Est. En dépit d'un long pontificat il resta populaire, y compris parmi les Italiens. Tout le monde se souvient des "santo subito" à sa mort et il fut vite canonisé.

Le premier pape du 21ème siècle fut Benoît XVI, un théologien visiblement plus préoccupé de spiritualité que de l'administration de l'Eglise et de l'évolution des moeurs (je me souviens de la grimace qu'a faite une vieille amie catho de gauche militante quand il fut élu). Ce catholique bavarois était visiblement proche de son prédécesseur polonais, mais il lui manquait son énergie. Noyé dans les intrigues du Vatican, découragé, il abdiqua et s'est retiré dans un monastère. J'espère pour lui qu'il s'y trouve des chats car il porte un grand amour à ces animaux, ce qui lui vaudra le paradis.

 Et nous arrivons au dernier (en date). D'emblée je me suis méfié : un pape jésuite, c'est avant tout un jésuite. Cette façon faussement simple de de faire appeler François comme s'il avait gardé les cochons avec tous ses coreligionnaires, la préférence affichée pour un modeste appartement plutôt que le palais du Vatican...On ne s'étonnera pas qu'il ait un compte twitter (pour toucher les jeunes...) et que son discours soit beaucoup plus politique ou moral que spirituel : accueillir sans barguigner les immigrés, ne pas gaspiller les ressources de ce monde.Pour un peu il serait même féministe... Décidément, il faut toujours se méfier de ces n...de d... de ratichons!

 

 

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