"On est les champions, je suis un champion !"
Mais non, je rigole et fais dissidence : je est un autre définitivement, qui n'aspire qu'à une chose, qu'ils foutent enfin la paix pendant 4 ans aux mauvais Français, aux rabat-joies qui n'ont pas chanté (faux) la "Marseillaise" enroulés dans notre drapeau tels Mireille Mathieu, qui n'ont pas arpenté les rues en beuglant, qui n'ont fait éclater ni pétards ni vitrines ni même brûlé la moindre voiture. Foin des adhésions obligatoires, surtout à la Fête, cette idole vermoulue de notre époque, cette ardente obligation. Foin du chauvinisme qui tourne vite à la xénophobie la plus fruste et transforme en Oustachis féroces les malheureux joueurs croates. Eût-on affronté l'Angleterre qu'on nous aurait rappelé Fachoda. Même si Macron a sauté comme un cabri à chaque but français (est-ce galant pour la présidente croate !) avant d'aller pincer l'oreille des joueurs en disant :"Pogba, je suis content de toi !" je ne peux me résoudre à voir la France s'incarner dans onze zèbres en petite culotte, je préfère Rabelais, La Fontaine, Hugo, Jeanne d'Arc ou même Brassens dont je fais mien ce vers : "Bande à part, sacrebleu, c'est ma règle et j'y tiens". Et comme je ne voue pas un culte à l'équipe de France, je ne lui demanderai pas plus que ne peuvent des jeunes talentueux mais qui ne sauraient en aucun cas être investis d'un magistère moral, voire du sauvetage de notre société qui se défait.
Naguère, sous le quinquennat de l'amateur de foot qu'est Hollande (il a d'ailleurs la morphologie et la bouffissure du joueur de canapé), Valls, après que Deschamp eut refusé de sélectionner Benzema pour une obscure affaire de cul, avait déclaré :" Un footballeur de ce niveau doit être exemplaire pour la jeunesse". C'était prendre les jeunes, et particulièrement ceux des "quartiers", pour des quiches car Benzema et consorts étaient pour eux un rêve inatteignable : des brouettées de fric avec lequel acheter de grosses voitures pour aller frimer auprès des potes d'avant et les régaler (en mode strictement halal), offrir un pèlerinage à La Mecque à sa vieille maman, se payer une grande villa avec piscine au bord de laquelle de jeunes et accortes créatures leur..... et leur.....(remplissez les vides en songeant aux paroles d'une chanson devenue célèbre depuis que le Président l'a écoutée dans la cour d'honneur de l'Elysée). Certains empruntent l'âpre chemin de la vertu et atteignent des postes prestigieux et bien rémunérés, mais ils ne connaîtront pas un tel ruissellement de thune.
Mais non, décidément, ces joueurs qui allaient aux putes et refusaient de chanter la "Marseillaise", il fallait changer ça. C'est alors qu'un communicant de génie a eu l'idée de revenir aux fondamentaux : 1998 et le fameux slogan "Black, blanc, beur". Il suffisait de promouvoir un autre groupe jugé plus docile et présentable. On vira donc les méchants Beurs traîtres et libidineux au profit des gentils Blacks (on se croirait dans un roman de Gérard de Villiers...). On a fait de ces derniers de véritables "oncles Tom" qui proclament à tout vent leur amour de la France, distribuent à des associations charitables l'argent durement gagné (peut-être pas tout quand-même...), et même, comme Pogba, taquinent la muse à l'occasion. Plus de go-go girls mais des épouses et de fiancés. Et les Blancs, me direz-vous ? Manquerait plus qu'ils aient à donner des preuves de vertu ! On est chez nous, non ?... En tout cas cette politique de réarmement moral et de patriotisme affiché a fonctionné et les Bleus sont au sommet de leur popularité. Je serais Macron, je leur collerais à tous la légion d'honneur et ferais Deschamps grand croix. Ce serait européennes gagnées.