Weinstein, Buzyn : sale temps pour le cinéma
Jusqu'à maintenant le cinéma français avait été peu touché par l'affaire Weinstein. Certes il y avait eu la reculade de la Cinémathèque qui a annulé sous la pression des féministes le festival J-C Brisseau (voir blog précédent) mais on comptait plutôt les points chez les Américains. Là-bas les dénonciations se multipliaient dans le pire style maccarthyste et quelques acteurs illustres et blanchis sous le harnais s'ajoutaient à la liste des porcs immondes, ne perdant pour l'instant que leur honneur. Ce qui n'est pas le cas du malheureux Kevin Spacey, frappé d'interdiction professionnelle et symboliquement tué puisque Ridley Scott veut l'effacer de son dernier film dans la plus pure tradition stalinienne. Tourner les scènes où apparaissait Spacey avec un nouvel acteur va coûter très cher, mais moins qu'un boycott ont considéré ses producteurs comme ceux de House of cards. C'est dire la puissance des lobbys aux USA. Ils ont compris qu'en frappant au portefeuille ils feraient interdire tout ce qu'ils voudraient. En tout cas quand le film sortira, je le boycotterai, moi, tant la puanteur de la moraline et de l'hypocrisie (qui n'a jamais péché...) me soulève le coeur. Dernière remarque : le bouc émissaire est un gay, le premier accusé un juif. J'ai dit ça, j'ai rien dit, mais je n'en pense pas moins...
Si aux Etats-Unis on n'est encore que dans l'autocensure, en France on fait mieux, puisque c'est le pouvoir politique qui menace le cinéma. Une sénatrice, dont je tairai le nom pour ne pas lui faire de publicité, a récemment interpellé la ministre de la santé, se plaignant que 70% des nouveaux films français montrent au moins une fois une personne qui fume, ce qui constitue pour elle une banalisation et donc une promotion du tabac, notamment auprès des jeunes. Cette statistique est proprement ahurissante et ce chiffre a visiblement été lancé au culot, ce qui marche toujours dans les débats parlementaires. Vous imaginez ce nouveau petit métier pour les chômeurs, compter les clopes allumées et les pipes bourrées dans une production qui frôle les 200 films par an ? Quant à l'exemplarité des héros de films, ça me fait rigoler. Les jeunes voient autour d'eux leurs parents, des amis, des profs, des quidams, des gens qu'ils admirent, détestent ou qui leur sont indifférents, la cigarette au bec. C'est la vie qui est banale, pas le cinéma. Peut-on croire qu'avoir effacé un mégot sur la fameuse photo de Sartre ait sauvé personne du tabagisme ? Et si notre belle jeunesse lobotomisée imitait en tout point ses héros, il faudrait aussi effacer l'alcool, les joints, les gâteaux à la crème, la baise sans capote, les armes à feu (le croiriez-vous ? leur usage est mortel...), la conduite de moto les cheveux au vent, les aliments au gluten, que sais-je encore...Mais qu'a donc répondu à cette sénatrice concernée notre ministre ? Au nom de la sainte Hygiène Big Sister ne relâchera pas sa surveillance et prendra les mesures qui s'imposent contre la déviance tabagique : il y aura un "plan de marketing pour la dénormalisation de l'image du tabac" (on peut être prof de médecine et parler le français comme une vache espagnole). Dans le domaine du cinéma, voici ce qu'on pourrait imaginer : le CNC ne financerait que les films où on ne verrait pas une seule cigarette (2ème petit métier : la traquer dans les synopsis). Et , pas de raison de s'arrêter en si bon chemin, si un film passait au travers, il serait purement et simplement interdit : on ne plaisante pas avec la santé de nos concitoyens. La ministre le martèle, "elle ne comprend pas l'importance du tabac dans le cinéma français". On ne doit pas aller voir les mêmes films, ou alors je suis drogué jusqu'à l'os et ne perçois plus rien. Je lui conseille quand-même de faire une cure de films des années 50 ou 60, c'était autre chose! On pourrait rire de tout ça en se disant qu'elle ne connaît pas grand chose au cinéma ni à la psychologie des adolescents, mais cette femme paraît tellement sûre d'elle et affamée de pouvoir qu'on peut tout craindre. Elle a conclu sur un ton menaçant : j'ai alerté Françoise Nyssen (qui n'est sûrement pas de taille à lui résister) et il y aura des mesures en ce sens. Scrogneugneu, vous allez voir ce que vous allez voir ! Eh bien moi, je dis : contre le politiquement correct, la moraline et l'hygiénisme, Résistance !