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Causons derechef
20 novembre 2012

Mohamed Merah ou comment sortir de l'abjection (publié sur mon blog disparu le 1/04/2012)

On a tout écrit sur Mohamed Merah. Que c'était un psychopathe, un fanatique, un héros (on ne l'a peut-être pas écrit mais certains l'ont pensé), un salaud, une victime de son origine, de son quartier, de son milieu, le fameux "terreau" qu'incriminent les écolos, ce qui est assez rigolo...Ses crimes ont été unanimement condamnés, parfois pourtant avec des "si", des "mais", des comparaisons qui visaient à en atténuer l'horreur. Qu'ajouter ? Essayons quand-même d'élever un peu le débat. Il y a dans cet assassin une dimension quasi dostoïevskienne, ce qui ne le justifie pas mais lui ôte son caractère de monstre.

Ce fut d'abord un médiocre, mauvais élève (on sait la valeur d'un CAP de chaudronnerie dans le cursus scolaire), petit voyou de quartier n'aimant que faire ronfler des moteurs et crisser les pneus de véhicules volés pour impressionner ses pairs, tout fier quand ceux-ci le filmaient. Le reste on le connaît : les jeux video, les matches de foot à la télé ou sur la pelouse pelée des "Isards", les sorties en boîtes dont on est souvent refoulé, l'ennui des cités. Jamais un livre. Des tentatives avortées pour en sortir : la Légion ou il ne reste pas 24 heures, les maquis djihadistes qui semblent s'en être débarrassés et un "mariage musulman" qui n'a pas duré jusqu'au printemps. Comme s'il cherchait à devenir un homme, mais tout ratait.

Puis quelque chose s'est déclenché qui a provoqué les sept meurtres abjects : trois militaires qu'il abat en leur tirant dans le dos, des enfants tués comme on fait éclater des pipes dans un tir forain. A partir de là toute limite était abolie et il y en aurait probablement eu d'autres s'il n'avait été repéré et assiégé. Ce fut alors la sordide négociation, des marchandages levantins : "remise de peine","irresponsabilité", la mère (qui d'ailleurs a refusé d'être complice).

Il a presque flanché, puis, terré dans sa salle de bain, il a eu un sursaut. Il a pris conscience de sa lâcheté, revu les soubresauts des paras à terre tués par derrière, imaginé la balle qui broie le crâne d'une petite fille et réduit sa cervelle en bouillie et ce qu'elle a ressenti quand il a agrippé ses cheveux. Il a soudain été certain qu'il n'y aurait pas de houri, ni de paradis d'Allah, ni même d'Allah. une vie d'échecs finissant dans le sang et la honte. Il ne lui restait plus qu'à mourir en guerrier, les armes à la main, pour recouvrer un peu de dignité. Dulce et decorum. Et il est sorti en tirant et dans un dernier saut il est entré dans le Néant.

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