Piétinons les vaches sacrées (publié sur mon blog disparu le 6/01/2012)
D'accord, il y a dans ce refus des héros de notre temps une bonne dose d'anticonformisme qui devient lui-même conformisme, un rejet du consensus avec des relents de révolte adolescente, l'obsession peu charitable de ne pas être dupe, mais quand on considère avec lucidité nos idoles, on se dit qu'on n'a pas tout à fait tort. Quelques exemples.
Yannick Noah : on se demande pourquoi il est toujours en tête du hit parade pour une victoire ancienne à je ne sais quel tournoi de tennis où il était un peu plus chargé que ses adversaires, ce pathétique vieux jeune homme avec ses dreadlocks sur des cheveux gris. De temps en temps il nous fait la leçon en roulant des mécaniques :"je m'exile si..." et il a déjà un pied en Suisse. Il continue à amasser des sous en faisant de la zique à 2 balles et se pare de son métissage comme d'une vertu.
Zidane : même ses meilleurs amis le disent, il est bête comme ses pieds mais "bien brave". Il bénéficie de deux légendes, celle du petit pauvre qui joue d'abord au foot sur un terrain vague avec une boîte de conserve puis atteint les sommets (ce qui fait rêver beurs et blacks des "quartiers" et les empêche de travailler à l'école) et celle de la pseudo-unité de la France lors de la Coupe du monde 1998.
Stéphane Hessel : pauvre vieillard exploité par un éditeur sans scrupule qui a fait un coup avec une interview de 32 pages dont le succès donne une piètre idée du niveau intellectuel du Français moyen. Avait-on vraiment besoin de lui pour s'indigner, on le fait tous les jours. La Gauche de la Gauche le trimballe parfois comme une idole coiffé tantôt d'un keffieh, tantôt d'un bonnet phrygien.
l'Abbé Pierre : Dieu nous garde des curés à béret et à canadienne barbus comme des missionnaires qui, fils de grands bourgeois, vont aux pauvres. Leur charité ne s'étend pas toujours jusqu'aux Juifs qu'une bonne tradition catholique considère comme déicides. L'abbé a un pendant féminin, Mère Theresa. Non seulement elle avait les positions les plus réacs sur l'avortement (après tout, une bonne soeur..) mais elle représentait cet insupportable paternalisme colonial dont le parangon fut dans les années 50 Schweitzer jouant du Bach dans sa léproserie de Lambaréné.
Coluche : Nul ne met en doute sa générosité exploitée rétrospectivement par quelques branquignols de la chanson qui ne manquent pas un gala "restos du coeur". A-t-on quand-même le droit de dire que son comique était vulgaire et démago ("enfoirés"), qu'il a dérapé quand il a cru à sa candidature présidentielle et que le "nez rouge" qu'il se targuait d'être avait vocation à être bouffon et non roi.
Gainsbourg : le chanteur de cabaret rive gauche qui avait écrit quelques beaux textes et séduit B.B. devint une sorte d'épave suivant les modes musicales pour écrire des chansons commerciales, se posa en cynique qui n'échappa pas à la vulgarité quand il brûla un billet de 500F à la télé.
Jeanne Moreau : il y a toujours eu des "grandes dames du cinéma français". Arletty, par exemple, mais celle-ci avait de l'abattage et de la gouaille. Jeanne Moreau fut lancée par un faux bon film, "Jules et Jim" et acquit une réputation que ne méritaient ni son talent d'actrice ni sa personne même. Derrière elle Catherine Deneuve attend impatiemment la couronne qu'elle mérite aussi peu.
Nicolas Hulot : qui sait ? Aurait pu arriver à l'Elysée grâce à la télé. Et dire que nous nous sommes moqués des Américains quand ils ont élu président un cowboy d'Hollywood.