A propos de la mort de Sylvia Kristel : le ciné porno et moi.
Sur une longue vie de cinéphile je n'ai fait qu'effleurer le cinéma porno contrairement aux freaks de la Cinémathèque qui avalent tout (si je puis dire) indistinctement. Assez tout de même pour l'avoir vu évoluer et m'être constitué une petite anthologie.
Ma première expérience remonte à la fin des années 60. Avec quelques copains provinciaux montés à Paris pour dévorer 4 ou 5 films par jour nous avons vu dans un ciné permanent près de la gare de l'Est un film du grand maître de ce genre à l'époque, Bénazeraf : des femmes nues (voyait-on les poils ?), des chaînes et une réflexion politique-alibi...Au total pas très bandant. Puis ce furent les films hygiénistes suédois qui guidaient les jeunes couples vers une sexualité épanouie et se terminaient toujours sur un accouchement (là, je fermais les yeux jusqu'à la fin de la séquence). C'était beaucoup plus iconoclaste quand un vrai cinéaste s'en mêlait (Vilgot Sjoman et Je suis curieuse). Puis ce furent les années 70 de si belle mémoire. Le porno explosa : salles spécialisées, pléthore de films soft ou hard. Sylvia Kristel ne tourna que des soft, notamment sous la direction de Just Jaeckin, cinéaste médiocre qui sombra parfois dans le ridicule (inénarrable Lady Chatterley's lover...). J'ai très peu fréquenté ces salles, un peu par honte sûrement (se mêler à ces vieillards libidineux et à ces travailleurs immigrés frustrés) mais aussi à cause de la médiocrité de la production. Le mieux, c'était les titres : L'arrière-train sifflera 3 fois ou La chatte sous un doigt brûlant. J'allai quand-même voir quelques films américains d'une qualité nettement supérieure à la production française : Gorge profonde, Derrière la porte verte, The devil in miss Jones. Cette qualité autorisait la transgression (c'était aussi le cas pour les Jess Franco en version hard). Tout cela était un peu folklorique et pas bien méchant, mais fut anéanti par la video et le porno dans la chambre à coucher, ce qui n'avait plus rien à voir avec le cinéma ni même avec l'érotisme. Quelque salles résistèrent, devenues des lieux de drague homo. D'ailleurs j'y fus draguè pour la dernière fois lors de la projection de Sebastiane, porno gay soft parlant latin...(c'était ça mon excuse). C'était à la fin des années 70, le type (vu dans le noir) qui tentait de me caresser les cuisses ressemblait à Michel Foucault. Je défendis ma vertu. C'est peut-être dommage : avoir couché avec Michel Foucault, ce n'aurait pas été rien...