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Causons derechef
17 mars 2016

Mon clodo chez les riches : un refuge pour SDF dans le 16ème.

L'affaire commence à faire du bruit, surtout depuis la réunion houleuse qui a eu lieu à l'université Paris-Dauphine lundi dernier. La mairie de Paris a décidé de construire un refuge pour SDF en bordure du bois de Boulogne, donc dans le 16ème arrondissement. C'est peu dire que la population n'y est guère favorable et elle s'est fortement mobilisée, notamment pour cette réunion d'information où les noms d'oiseau, voire les injures les plus grossières, ont volé. On pouvait s'y attendre, mais le plus intéressant, comme souvent, est la réaction des réseaux sociaux. Elle se partage entre l'indignation vertueuse et la schadenfreude assumée. "Comment osent-ils, eux qui ont tout - s'écrient nos moralistes sévères - refuser à des malheureux un logement alors qu'ils vivent dans des appartements immenses ? Comment peuvent-ils n'avoir aucune pitié pour ces gens qui n'ont rien ?". A croire que tous ces bons apôtres pratiquent avec constance et amour les oeuvres de miséricorde que recommande notre sainte mère l'Eglise. Ils vont même, mais là ils exagèrent, jusqu'à dénoncer la grossièreté du langage de ces bourgeois qu'ils imaginaient mieux éduqués. Que n'ont-ils lu les duettistes sociologues au nom de clown qui font leur beurre sur le dos des riches, ils auraient appris que le XVIème est en partie peuplé de princes arabes, d'oligarques russes, de pipoles et d'entrepreneurs pétés de fric et vulgaires qui se font photographier à Roland-Garros. Rien à voir avec la bonne bourgeoisie ou les débris de notre aristocratie qui habitent le VIIème. Pourtant ce pharisaïsme n'est rien à côté de la joie maligne de voir les riches punis et, pense-t-on, humiliés. Il est vrai que certains d'entre eux y prêtent la main en se plaignant que leur propriété va perdre de leur valeur dans un tel environnement. Quoi qu'il en soit l'envie du populo s'étale de la façon la plus crue et la plus obscène. Ces bourgeois qui bouffent du caviar à la louche, qui vivent dans du Louis XV authentique, qui ont villa sur la Côte et chasse en Sologne, vont être ravalés au rang du vulgus . Leurs tendres pucelles, élevées à Sainte Marie de Neuilly, seront menacés de viol par des clochards puants, leurs rombières se feront arracher leurs perlouzes dans la rue par des junkies en manque, leur vue sera offensée par des flaques de dégueulis violet dans les sentiers de "leur" Bois où ils piétineront des tessons de bouteilles et des boîtes de bière, deux ou trois gaillards à l'air menaçant leur demanderont de l'argent à chaque fois qu'ils mettront le nez dans la rue. Enfin, ils vont vivre comme vous et moi, ça n'améliorera pas notre sort mais le savoir partagé le rendra moins pénible.

Entre bourgeois égoïstes, "vrais gens" envieux et hypocrites et "salauds de pauvres" tout cela ne donne pas une très haute idée de l'humanité, mais quid des principaux intéressés ? Il faut bien les mettre quelque part et on est à peu près sûr qu'ils seront mal accueillis partout. Le choix du XVIème n'est peut-être pas une si bonne idée et personne n'osera dire qu'Anne Hidalgo dont on connait le sectarisme, n'a pas eu d'arrière-pensées et ce que ce choix  révèle n'est pas joli-joli. On les coince là-haut entre le boulevard des maréchaux et l'hippodrome d'Auteuil, dans un quartier résidentiel sans rades accueillants au pauv'monde ni épicier de quartier pour les fournir en calendos et litrons de Kiravi (oui, je sais, je suis en plein dans le cliché...). Leurs trognes vulgaires et leurs gestes déplacés n'effraieront plus le touriste chinois dans les quartiers du centre et dans les arrondissements où la mairie recrute ses électeurs. Visiblement leurs désirs et leurs façons de vivre n'ont pas été pris en compte. N'y aurait-il pas eu un arrondissement plus central, plus "parisien", où ils auraient été mieux accueillis ? Un arrondissement où ne manquent pas les emprises SNCF, les hôpitaux et les ateliers à l'abandon ? Mais oui, vous y pensez comme moi. Ils y auraient retrouvé le canal Saint-Martin cher à la littérature populiste et une population dont l'ouverture à l'Autre, la générosité, la tolérance ont été assez vantées : les bobos puisqu'il faut les appeler par leur nom. Il s'agit du XIème évidemment. On se demande à quoi ils pensent à la Mairie de Paris...

Commentaires
L
J'ose avouer que ces grands problèmes citadins me laissent un peu froid. Quant à la gent humaine, qu'elle soit riche ou pauvre, je ne me faisais guère d'illusions et moins encore aujourd'hui. Nous avons vécu, dans la ville voisine, les mêmes rejets de la part d'habitants de petits pavillons à bas coût aux jardinets bien proprets à l'annonce de la construction par les HLM de petites maisons, à bas coût, à proximité. Les "sans dents" ont fini par s'entendre, bien sûr. Pour ma part, j'ai pris grand plaisir à écrire un roman à partir d'une histoire vraie qui traite précisément d'une solidarité dans un petit hameau perdu du Limousin :"La maison bleue". Car cela existe encore, la solidarité silencieuse..
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